FAMILLES RECOMPOSÉES : QUEL STATUT POUR LE BEAU-PARENT ?
Près de la moitié des personnes ayant connu plusieurs unions (mariées ou non) ont eu un enfant au sein d’une relation précédente. Ce chiffre en augmentation constante amène la question du lien entre beau-parent et enfant(s) du conjoint. La situation concerne plus d’un enfant sur dix en France : 1,5 million d’enfants vivent en famille recomposée. La figure de la marâtre n’a beau appartenir qu’aux contes, le beau-parent se trouve encore « hors du droit » en France, malgré son rôle dans l’éducation au quotidien et son possible souhait de transmission successorale à cet enfant.
Plusieurs rapports et propositions de lois avaient prévu d’instituer un statut pour le beau-parent. Les réactions ont été toutefois vives à l’encontre d’une telle idée. On a craint notamment que ne soit diminué le rôle du père ou de la mère biologique. Accorder une place au beau-parent reviendrait à effacer celui des parents qui ne vit pas avec l’enfant. S’il n’est plus question aujourd’hui de créer un statut uniforme pour le beau-parent, l’idée est davantage d’offrir de nouveaux outils permettant au beau-parent d’intervenir dans l’éducation de l’enfant, ou à tout le moins de rénover les outils existants qui se révèlent soit insuffisants, soit inadaptés. On pense ici à l’adoption de l’enfant du conjoint qui mérite d’être repensée, une adoption simple dans la plupart des cas.
Elle crée un lien de filiation entre l’adoptant et l’adopté, mais ne rompt pas celui entre l’adopté et sa famille d’origine contrairement à l’adoption plénière. L’adopté a donc deux liens de filiation et deux familles.
L’adoption simple est trop souvent utilisée dans une logique de transmission successorale alors que ce n’est pas son objet premier. Une réforme récente a aligné le traitement fiscal de l’« adopté simple » sur celui des autres enfants, biologiques ou pleinement adoptés en matière de droits de donation et de succession. Également, les règles de dévolution du nom de famille en cas d’adoption simple posent question, tout comme les règles successorales. La question de la place du beau-parent est aussi l’occasion de s’intéresser à la délégation partage de l’autorité parentale.
Elle permet aux parents d’accorder, sans la perdre, leur autorité parentale à un tiers, souvent le beau-père ou la belle-mère dans les familles recomposées. Elle est en général partielle et vise des actes de la vie courante, comme emmener l’enfant chez le médecin ou aller le chercher seul à l’école.
Concrètement, les parents peuvent demander la délégation de leur autorité parentale si ce transfert d’autorité est indispensable à l’intérêt de l’enfant et si les circonstances l’exigent. Ils doivent saisir le juge aux affaires familiales (JAF), qui les convoque avec le tiers destiné à recevoir la délégation (souvent le beau-parent). Le JAF et le procureur de la République rendent ensuite leur avis, autorisant ou non la délégation-partage de l’autorité parentale. Une piste moins lourde à mettre en œuvre serait le mandat d’éducation quotidienne : s’il était créé par le législateur, il pourrait être reçu par le notaire et contenir une liste d’actes usuels de l’autorité parentale que le beau-parent pourrait réaliser de façon plus générale.
Pour aller plus loin : Les actes usuels de la vie courante ne sont pas toujours faciles à définir.
Des exemples sont donnés par le rapport Filiation, origines, parentalité : « La plupart du temps, sont considérés comme usuels : la réinscription dans un établissement scolaire, l’inscription à la cantine, les justifications d’absences, les inscriptions à l’aide aux devoirs ou aux ateliers du soir, la présence aux réunions parents-professeurs à l’école, l’accompagnement des sorties d’école, les récupérations à l’école, les soins courants ou habituels (soins dentaires de contrôle ou de routine, vaccinations obligatoires, visite médicale…), la récupération chez le médecin ou même à l’hôpital en cas d’hospitalisation urgente ou non. En revanche, tout changement d’établissement scolaire, choix d’option à l’école, décision d’intervention chirurgicale (sauf celles totalement bénignes), choix d’une éducation religieuse et de ses modalités sont à porter au nombre des actes graves nécessitant le consentement des deux parents titulaires de l’autorité parentale ».
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